Longtemps, la peinture de Claude Marchat a dégagé l’impression d’une construction solide, soigneusement équilibrée. Faits à partir de masses imposantes, ses murs de couleur ne semblaient pour autant statiques. Noirs, rouges, beiges…les rectangles de géométrie variable, souvent penchés, parfois flottants, n’étaient jamais figés.
Récemment, toutefois, l’univers de l’artiste a subi une métamorphose, pour ne pas dire un big-bang pictural. Les formes ont éclaté et remplissent les toiles de fragments virevoltants, de configurations inconnues, comme les expressions condensées d'une poésie personnelle et universelle. Face à ces figures qui s'envolent et se transforment en constellation de signes calligraphiques en provenance d'un abécédaire secret et fantasque, l'œil est tiraillé entre représentations et idéogrammes, familiarité et incertitude. Dans ces collages ou assemblages picturaux, la narration est congédiée, l'événement est exclu, le temps est arrêté, la réalité est dématérialisée.
On le sait, dans son travail, Marchat a recours à la technique du collage. Le sol de son atelier est jonché d’innombrables revues qu’il découpe et dont il insère ces différentes sortes d’objets dans ses œuvres. Tout laisse à penser que la déconstruction ambiguë sur laquelle se fond le collage se voit ici prolongée avec ces détails, suggestifs et pourtant méconnaissables, qui dévoilent et brouillent en même temps les rouages de la représentation.
Itzhak Goldberg
Correspondant au magazine :"Beaux Arts"